Choc électrique en zone de TV

Tracé
N° 11
Constructeur Biotronik Prothèse DAI Chapitre Thérapies
Patient

Homme de 77 ans implanté d’un défibrillateur triple chambre Lumax 340 HF-T pour une myocardiopathie ischémique avec fraction d’éjection à 25% et bloc de branche droit; palpitations puis choc électrique puis syncope; rapport événement (couleur jaune) dans le cadre d’une TV2 classifiée avec choc inefficace.

Tracé

Tracé télécardiologie

  1. TV avec dissociation auriculo-ventriculaire;
  2. cycles alternant entre zone de TV1 et zone de TV2; il est à noter que la zone de TV1 était une zone moniteur; les compteurs de TV1 étaient remplis (épisode TV1 précédent retrouvé à l’interrogation) mais aucune thérapie n’a été délivrée;
  3. classification d’un épisode de TV2;
  4. 6 séquences d’ATP ont été délivrées ainsi que 2 chocs électriques; le dernier choc électrique à 40 Joules est visualisé (impédance de choc 54 Ohms); sur le tableau, on peut voir que le diagnostic initial est TV2 avec 6 ATP puis 2 chocs délivrés avec 1 choc annulé;
  5. réduction de l’arythmie; l’affichage « PostSh DDI » après le choc traduit le fait que le défibrillateur fonctionne selon le mode de stimulation post-choc programmé (DDI) pour une durée programmable (nominal : 10 secondes);
  6. arrêt (fin de l’épisode) après 12 cycles consécutifs classés VS ou stimulés;

Tracé programmateur (même épisode)

  1. première rafale (10 stimuli à fréquence fixe à 80% de la fréquence de la tachycardie; stimulation biventriculaire);
  2. échec de la rafale et persistance de l’arythmie;
  3. cycles classés VDs; en confirmation post-thérapie d’une TV2, si le cycle est dans la zone de TV1, il est classé comme VDs;
  4. compteur de reclassification TV2 rempli (compteur programmé à 14: avant la redétection: 16 cycles TV2 et 2 cycles VDs) sans jamais que le compteur de fin d’épisode (12 cycles lents/16) ne soit rempli;
  5. seconde rafale avec 1 stimulus de plus;
  6. échec de la rafale et reclassification TV2 (compteur à 14);
  7. troisième rafale;
  8. quatrième rafale;
  9. cinquième rafale;
  10. sixième rafale;
  11. échec de la thérapie, la thérapie suivante est un choc à 10 Joules;
  12. le trait noir correspond à la charge des condensateurs qui est courte pour une amplitude de choc basse;
  13. en fin de charge, recherche d’un cycle court et choc électrique de 10 Joules (impédance de choc 56 Ohms); le choc est synchronisé sur l’onde R et l’on peut voir chez ce patient que la dépolarisation ventriculaire gauche précède la dépolarisation droite et le choc électrique survient durant la repolarisation ventriculaire gauche;
  14. blanking sans détection de 1 seconde à la suite du choc électrique;
  15. dégradation du rythme en FV;
  16. sous-détection de l’arythmie dans le canal ventriculaire droit (meilleure détection dans le canal ventriculaire gauche);
  17. redétection d’une FV (8 cycles sur 12 classés FV);
  18. nouvelle charge des condensateurs;
  19. en fin de charge, recherche d’un cycle rapide;
  20. en raison d’une sous-détection ventriculaire droite marquée, 4 cycles sur 5 sont classés VS ou VP, le choc n’est pas délivré;
  21. nouvelle redétection de FV: (8 cycles sur 12 classés FV);
  22. nouvelle charge très courte, les condensateurs n’ayant pas eu la possibilité de se vider;
  23. choc délivré (ce choc n’est pas confirmé);
  24. choc efficace, réduction de l’arythmie et fin de l’épisode après 12 cycles VDs ou VDp.

Patient: homme de 67 ans avec myocardiopathie ischémique implanté d'un défibrillateur Lumax 540 VR-T; palpitations puis choc électrique.

Tracé télécardiologie

  1. probable TV;
  2. 6 séquences de stimulation anti-tachycardique puis un choc électrique ont été délivrés;
  3. réduction de l'arythmie;

Tracé programmateur (même épisode)

  1. rampe correspondant à la sixième séquence de stimulation anti-tachycardique;
  2. début de la charge des condensateurs;
  3. en fin de charge, choc de 40 Joules synchronisé;
  4. réduction de l'arythmie.
Commentaires

Ces tracés montrent les différentes possibilités de programmation de l'amplitude des chocs électriques en zone de TV.

Pour le premier épisode diagnostiqué initialement en zone de TV2, les thérapies s’enchainent les unes après les autres. La série s’arrête dès que le rythme est considéré à nouveau comme lent, ou parce que toutes les thérapies ont été épuisées. Six rafales n’ont pas permis la réduction de l’arythmie. Un premier choc à 10 Joules est ensuite délivré. Ce patient présentait des épisodes de TV provenant du ventricule gauche (EGM VG précédant le VD). Le choc électrique est synchronisé sur la détection VD (30 ms après). Sur ce type d’arythmie, l’EGM suggère que le choc a été délivré durant le début de la phase de repolarisation ventriculaire gauche. L’émission d’un choc d’amplitude modérée en phase vulnérable ventriculaire gauche explique le caractère arythmogène du choc et la dégradation de l’arythmie en fibrillation ventriculaire. Pour le second patient, un choc d'amplitude maximale est directement programmé à la suite de la stimulation anti-tachycardique.

Si il n’existe pas de programmation optimale universelle, les résultats d’études portant sur de larges effectifs concordent sur la nécessité de réduire le nombre de thérapies inappropriées ou inutiles sans altérer la sécurité du patient et de favoriser la stimulation anti-tachycardique par rapport aux chocs électriques. Il est d'usage de programmer des thérapies d'agressivité croissante et la stimulation anti-tachycardique représente la thérapie de première intention pour les tachycardies monomorphes.  Dans la zone de TV (< 200 battements/minute), une série de bursts plutôt que de rampes (indication de classe I) est donc habituellement programmée. En effet, le ratio entre réduction et accélération de l'arythmie semble en faveur du burst (efficacité identique mais caractère pro-arythmogène moins marqué) par rapport à la rampe. Si les bursts s'avèrent inefficaces, il est alors possible de programmer une série de rampes pour favoriser une thérapie non douloureuse puis une série de chocs électriques ou directement les chocs électriques. Différents paramètres influencent le choix de l'amplitude du premier choc en zone de TV qui peut être programmée à l'énergie maximale ou à une amplitude moindre (de l'ordre de 10 Joules). On peut retrouver un certain nombre d'avantages à une programmation d'un premier choc d'amplitude modérée (10 Joules):

  1. cette amplitude est très souvent suffisante pour réduire un épisode de TV;
  2. le temps de charge pour cette amplitude est très court même si les quelques secondes de différence par rapport à une amplitude maximale ne sont pas déterminantes cliniquement quand le choc survient après 3 séquences de bursts plus ou moins 3 séquences de rampes (plus d'une minute d'arythmie);
  3. la consommation est moindre pour un choc à 10 Joules versus 35 Joules même si l'usure des batteries est peu impactée si le nombre de chocs délivrés est limité;
  4. même si la plupart du temps lors d'un épisode de TV, le choc électrique est délivré alors que le patient est toujours conscient, le caractère douloureux du choc rentre peu dans la décision portant sur l'amplitude du premier choc, étant difficile de démonter une relation directe entre amplitude du choc délivré et amplitude de la douleur occasionnée;
  5. différentes études ont démontré le caractère délétère d'un choc électrique et l'association avec une altération du pronostic; il parait donc logique de penser qu'un choc de 10 Joules aura moins de conséquences négatives qu'un choc de 35 Joules et il semble souhaitable de choisir la thérapie la moins traumatique possible.

Le premier tracé montre toutefois la limite principale de la programmation d'un choc de 10 Joules en zone de TV et le risque pro-arythmogène (concept de limite supérieure de vulnérabilité). En-dessous d'une certaine valeur variable en fonction des patients et directement reliée au "seuil" de défibrillation, non seulement un choc peut s'avérer inefficace pour réduire une arythmie mais peut de surcroit accélérer et désorganiser une TV monomorphe en une arythmie polymorphe compromettant le pronostic du patient à court terme. Ce tracé montre une arythmie rapide, polymorphe, peu voltée et très préoccupante induite par le premier choc. Les arythmies induites sont souvent associées avec des cycles ventriculaires très courts d'amplitude limitée majorant le risque de sous-détection et d'interruption inappropriée de la charge des condensateurs. La détection lors de cet épisode de FV est très imparfaite : retard de diagnostic modéré mais surtout faux diagnostic de retour sinusal et interruption momentanée de la charge. La détection s’améliore dans un second temps permettant la réduction par choc électrique. La détection VD était programmée sur SOT (suppression onde T) sans surdétection préalable de l’onde T. La détection VG était sur Standard. Chez ce patient, il parait indispensable de reprogrammer une détection VD standard voire détection accrue de la FV. Cette nouvelle programmation peut ensuite être validée par une induction avec vérification d’une détection correcte de la FV.

Ce type d'effet indésirable est relativement rare mais constitue une limite majeure d'une programmation de chocs d'amplitude modérée. Une autre alternative est donc de programmer un premier choc d'amplitude maximale de façon à augmenter la probabilité de réduire une TV dès la première tentative, de réduire au maximum le nombre de chocs délivrés et de se situer au delà de la limite supérieure de vulnérabilité ventriculaire.

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