Modes traditionnels de stimulation

Généralités

En fonction du nombre de sondes et du modèle de dispositif implanté, différents modes de stimulation sont programmables. Le fonctionnement, les avantages et les inconvénients propres à chaque mode de stimulation doivent être familiers du médecin assurant le suivi afin d’optimiser la programmation par rapport aux spécificités des différents patients implantés.

LE CODE INTERNATIONAL

Une approche combinée entre la société nord-américaine et la société anglaise de stimulation et électrophysiologie (NASPE et BPEG) a permis de définir un code international (NBG) de classification des différents modes de stimulation. Les divers modes de stimulation sont qualifiés par un code à 4 ou 5 lettres permettant de comprendre leur fonctionnement de base.

  • La première lettre définit le(s) site(s) de stimulation : ventricule (V), oreillette (A), les deux (D), simple chambre (S) ou aucune (0).
  • La deuxième lettre définit le(s) site(s) de détection : mêmes lettres.
  • La troisième lettre indique le mode de fonctionnement : inhibé (I), déclenché (T, pour triggered), les deux (D), aucun des précédents (0).
  • La quatrième lettre indique l’asservissement de fréquence (R) ou son absence (0).
  • La cinquième lettre indique la présence d’une stimulation multisite : absence (0), atriale (A), ventriculaire (V) et double (D : A+V).

STIMULATEURS SIMPLE CHAMBRE

Les modes asynchrones SOO (VOO et AOO)

  • Stimulation simple chambre
  • Pas de détection
  • Stimulation asynchrone

Les modes A00 et V00 fournissent une stimulation asynchrone à fréquence fixe à la fréquence minimale programmée sans inhibition par des événements spontanés dans la cavité concernée.

Le seul intervalle à programmer est l'intervalle de stimulation (ou fréquence = 60 000/intervalle de stimulation). Il s'agit donc du mode de stimulation le plus basique et était le seul mode programmable sur les tous premiers stimulateurs.

Aspect élecrocardiographique (V00): survenue régulière de stimuli de stimulation ventriculaires sans influence de l’activité spontanée intrinsèque.

Aspect élecrocardiographique (A00): même chose pour l’oreillette.

Les modes A00 et V00 sont les modes sous aimant respectivement des modes simple chambre atriaux et ventriculaires correspondants. Le mode V00 est également le mode sous aimant du mode VDD.

Les modes S00 en programmation permanente sont aujourd’hui obsolètes et correspondent à des modes de test; ils pouvaient initialement être programmés pour éviter la détection d’interférences électromagnétiques et l’inhibition qui en résultait chez les patients dépendants de leur stimulateur. Cependant, ce mode de stimulation est associé avec un risque arythmogène par stimulation sur l’onde T, et il ne faut l’utiliser que comme mode de test.

Les modes SSI/ SSIR

Le mode SSI est simple chambre, VVI si la sonde est implantée dans le ventricule et AAI si la sonde est dans l’oreillette. Pour ces 2 modes de stimulation, une stimulation survient à la fin d’un intervalle d’échappement programmable. Si un évènement spontané est détecté, la stimulation est inhibée et l’intervalle d’échappement est recyclé. En l’absence d’événement spontané, le stimulateur stimule à la fin de l’intervalle de stimulation programmé.

Le mode VVI/VVIR

  • Stimulation ventriculaire
  • Détection ventriculaire
  • Inhibition par la détection d’un signal ventriculaire hors périodes réfractaires

Le mode VVI fournit une stimulation simple chambre à la fréquence de stimulation programmée, à moins d’une inhibition par un événement détecté. La détection ne s’applique qu’au ventricule. Un intervalle d'échappement débute après toute détection ventriculaire.

Il est important de noter que la détection d’un signal ventriculaire spontané par le stimulateur peut être retardée par rapport au début du complexe QRS visualisé sur l’électrocardiogramme de surface. Cela est particulièrement visible chez un patient présentant un bloc de branche droit, la détection du QRS ne se faisant que quand la dépolarisation ventriculaire passe devant la cathode en position ventriculaire droite.

La première partie du cycle RR, après détection comme après stimulation, correspond à la période réfractaire pendant laquelle le stimulateur ne peut pas détecter de signal. Un signal survenant dans cette période réfractaire ne recycle pas l'intervalle d'échappement. Cette période réfractaire est nécessaire pour éviter une double détection d’un même complexe QRS spontané ou stimulé, ou la détection d’une onde T. Un signal détecté après cette période réfractaire inhibe la stimulation et recycle l'intervalle d'échappement.

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Le mode VVIR fournit une stimulation simple chambre ventriculaire à la fréquence asservie qui est une fréquence de base variable avec l’effort mesuré par un capteur.

Le mode VVI/VVIR est particulièrement indiqué chez les patients en fibrillation auriculaire permanente chez qui la détection et la stimulation atriale sont inutiles. Ce mode peut être également programmé chez des patients présentant des épisodes de bradycardie paroxystique. La fréquence minimale est programmée inférieure à la fréquence spontanée du patient et le stimulateur ne se déclenche que lors de la survenue d’une pause.

Le mode AAI/AAIR

  • Stimulation atriale
  • Détection atriale
  • Inhibition par la détection d’un signal atrial hors période réfractaire

Le mode AAI fournit une stimulation atriale simple chambre à la fréquence de stimulation programmée à moins d’une inhibition par un événement détecté.

La détection ne s'applique qu'à l'oreillette.

La programmation et le fonctionnement sont sensiblement les mêmes que pour un stimulateur VVI. Il faut toutefois programmer une sensibilité plus élevée (valeur programmée plus basse), l'amplitude des complexes atriaux étant souvent plus faible que celle des complexes ventriculaires. De même, la période réfractaire doit être plus longue pour éviter toute surdétection ventriculaire. La détection d'une onde R par un stimulateur AAI entraine une baisse de la fréquence de stimulation, car chaque onde R détectée  recycle l'intervalle d'échappement. En présence d'une écoute croisée (détection de l'onde R), il est possible de rendre le stimulateur moins sensible et/ou de prolonger la période réfractaire.

Aspect électrocardiographique typique : stimulation et capture atriale avec inhibition de la stimulation lors de la détection d’une activité atriale spontanée.

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Le mode AAIR fournit une stimulation simple chambre auriculaire à la fréquence asservie.

L’indication préférentielle d’un stimulateur AAI/AAIR est la présence d’une dysfonction sinusale pure avec préservation d’une conduction auriculo-ventriculaire normale. Au moment de l’implantation, il est donc important de vérifier la qualité de cette conduction auriculo-ventriculaire. L’existence d’une conduction auriculo-ventriculaire 1/1 au-delà d’une fréquence de stimulation atriale supérieure à 120-130 battements/minute associée à un intervalle PR normal et des QRS normaux, est un bon reflet d’une conduction préservée. Dans ce cadre, le risque de bloc auriculo-ventriculaire est limité.

Les modes SST (VVT ou AAT)

  • Stimulation ventriculaire ou atriale
  • Détection ventriculaire ou atriale
  • Déclenchement de la stimulation sur onde R ou onde P détectée hors période réfractaire

En modes AAT et VVT, la stimulation se produit à la fréquence minimale programmée, mais un événement détecté en dehors des périodes réfractaires déclenche une stimulation immédiate dans la cavité correspondante. Cette stimulation est non dangereuse car elle survient systématiquement dans la période réfractaire absolue naturelle du myocarde ventriculaire ou auriculaire.

Les 3 paramètres importants à programmer sont la fréquence de base, la fréquence maximale et la période réfractaire. Les 2 derniers permettent d'éviter l'emballement du stimulateur à la suite de la détection de signaux rapides.

Aspect électrocardiographique typique (VVT) : en l’absence d’activité spontanée, stimulation et capture ventriculaire à intervalle fixe. La survenue d’un complexe ventriculaire spontané en dehors des périodes réfractaires entraine la survenue d’un stimulus à l’intérieur du QRS. L’aspect du QRS est soit identique au QRS spontané (pseudo-fusion) soit intermédiaire entre le QRS spontané et le QRS stimulé (fusion).

Aspect électrocardiographique typique (AAT) : même chose pour l’oreillette.

Ce type de mode de stimulation est aujourd’hui très peu utilisé. En effet, la stimulation lors de la détection est associée avec une augmentation inutile de la consommation énergétique avec accélération de l'usure de la batterie. Ils peuvent être utilisés temporairement pour éviter une inhibition chez un patient dépendant présentant une sur-détection. Ils peuvent permettre également de vérifier la qualité et le moment de la détection au cours de tests temporaires.

STIMULATEURS DOUBLE CHAMBRE

Le mode D00

  • Double stimulation asynchrone
  • Pas de détection

Le mode D00 fournit une stimulation séquentielle AV à la fréquence minimale programmée sans inhibition par des événements intrinsèques.

Les délais AV et les délais VA sont fixes et ne sont pas recyclés puisque la détection n’est pas possible.

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En plus d’être directement programmable, le mode D00 est le mode double chambre appliqué lorsqu’un aimant est placé en regard du stimulateur, à l’exception du mode VDD (mode sous-aimant V00, car pas de stimulation atriale possible).

Le mode DDD/DDDR

  • Double stimulation (atriale et ventriculaire)
  • Double détection (atriale et ventriculaire)
  • Double réponse à la détection (inhibée et déclenchée)

Le mode DDD correspond au mode de programmation standard des stimulateurs double chambre ou de resynchronisation. Il permet d’assurer une synchronisation auriculo-ventriculaire au repos comme à l’effort sur activité atriale détectée ou stimulée.

Une activité atriale spontanée survenant en dehors des périodes réfractaires inhibe la stimulation atriale. Une activité spontanée ventriculaire survenant en dehors des périodes réfractaires inhibe la stimulation ventriculaire.

Chaque événement atrial stimulé ou chaque événement atrial détecté en dehors des périodes réfractaires marque le début d’un délai AV et un intervalle de fréquence minimale.

Les délais AV qui suivent les événements atriaux détectés et les événements atriaux stimulés sont programmables séparément ; il est possible de programmer le raccourcissement des délais AV lorsque les fréquences augmentent (délai AV adaptable) ou leur modification en fonction des temps de conduction spontanés.

Un événement ventriculaire stimulé peut suivre un événement atrial détecté jusqu’à la fréquence maximale synchrone programmée : c’est la limite de fréquence à partir de laquelle le stimulateur n’est plus autorisé à stimuler le ventricule en suivant la fréquence des oreillettes.

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En mode DDDR, le stimulateur suit la plus rapide des fréquences, atriale intrinsèque ou la fréquence indiquée par le capteur. La fréquence maximale synchrone et la fréquence maximale asservie sont programmables séparément.

Le mode DDD est sensé répondre aux caractéristiques présentées par l’ensemble des patients implantés.

Le mode DDI/DDIR

  • Double stimulation (atriale et ventriculaire)
  • Double détection (atriale et ventriculaire)
  • Inhibition par les événements détectés (atriaux et ventriculaires)

La stimulation atriale s’effectue à la fréquence minimale programmée.

Après stimulation atriale, la stimulation ventriculaire se produit à la fin du délai AV s’il n’y a pas d’événement ventriculaire détecté pendant ce délai.

Un événement atrial détecté en dehors des périodes réfractaires inhibe la stimulation atriale et ne déclenche jamais de délai AV.

Ainsi, après une détection atriale et en l’absence de conduction AV spontanée, la stimulation ventriculaire survient à la fréquence minimale, dissociée de la détection atriale, comme dans un stimulateur VVI.

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En cas d’arythmie atriale, il ne peut jamais survenir d’emballement de la fréquence de stimulation ventriculaire puisque un événement atrial spontané ne déclenche jamais de délai AV.

Le mode DDI est proposé en cas d’arythmie atriale fréquente chez un patient avec syndrome brady/tachycardie.
Ce mode de stimulation n’est pas adéquat pour les patients en bloc auriculo-ventriculaire complet avec fréquence atriale spontanée élevée, les ondes P spontanées ne synchronisant pas de délai AV. Ce mode de stimulation peut être programmé chez les patients en bloc auriculo-ventriculaire complet avec maladie de l’oreillette : en rythme sinusal, une dysfonction sinusale est observée résultant en une double stimulation auriculo-ventriculaire ; lors d’un épisode d’arythmie, l’activité atriale spontanée rapide n’est pas suivie d’une stimulation ventriculaire rapide. Ce mode est particulièrement utile quand l’algorithme de repli dysfonctionne.

Le mode VDD

  • Stimulation ventriculaire
  • Double détection (atriale et ventriculaire)
  • Stimulation ventriculaire déclenchée par la détection atriale, inhibition par les événements atriaux et ventriculaires

La détection s’effectue dans l’oreillette et dans le ventricule mais la stimulation ne s’effectue que dans le ventricule. Le mode VDD fournit une stimulation synchronisée sur l’oreillette détectée. S’il n’y a pas d’événement atrial, la stimulation est de type VVI à la fréquence de base.

Le ventricule est stimulé de façon synchrone à l’oreillette jusqu’à la fréquence maximale synchrone.

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Le mode VDD n’est donc pas approprié pour les patients présentant une dysfonction sinusale, aucune stimulation atriale n’étant possible. Le mode VDD est adapté chez les patients avec bloc auriculo-ventriculaire complet, fonction sinusale et fonction chronotrope normales. Il est possible également d’implanter un système de stimulation spécifique VDD avec une seule sonde de stimulation/détection ventriculaire avec deux électrodes flottantes permettant la détection atriale.

Le mode DDT

  • Double stimulation (atriale et ventriculaire)
  • Double détection (atriale et ventriculaire)
  • Stimulation ventriculaire et atriale sur toute détection ventriculaire ou atriale hors périodes réfractaires.

C’est un mode de test temporaire pour la détection.