SecureSense Défibrillateurs
Programmation des défibrillateurs Abbott: les nouvelles recommandations
La programmation d’un défibrillateur est complexe et doit intégrer les caractéristiques du patient implanté mais également les spécificités dans la façon de détecter, compter ou discriminer des dispositifs des différentes compagnies. Il est ainsi parfois difficile d’extrapoler les résultats d’une étude menée sur les défibrillateurs d’une compagnie aux dispositifs des 4 compagnies concurrentes tant les bases et la philosophie de fonctionnement peuvent différer. Si il n’existe pas de programmation optimale universelle, les résultats d’études portant sur de larges effectifs concordent sur la nécessité de réduire le nombre de thérapies inappropriées ou inutiles sans altérer la sécurité du patient et de favoriser la stimulation anti-tachycardique par rapport aux chocs électriques ce qui pourrait permettre d’améliorer la qualité de vie des patients mais également pourrait améliorer le pronostic avec un bénéfice significatif en termes de mortalité. La publication de recommandations définissant les grands principes de programmation d’un défibrillateur était donc devenue absolument nécessaire pour homogénéiser les pratiques dans les différents centres. Le manuscrit proposé s’appuie sur une analyse détaillée de la littérature pour définir des grandes priorités de programmation mais également pour proposer une programmation-type différente pour les dispositifs des 5 principales compagnies. La programmation proposée s’éloigne souvent grandement de la programmation nominale proposée par la compagnie.
- En prévention primaire ou secondaire, pour réduire le nombre total de thérapies (appropriées ou inappropriées) délivrées, la programmation doit permettre une durée minimale de 6 secondes (soit une trentaine de cycles en fonction de la fréquence) quelle que soit la zone (FV ou TV) avant que le compteur de détection ne soit complété (indication classe I)
- En prévention primaire, pour réduire le nombre total de thérapies délivrées (appropriées ou inappropriées), la zone de thérapie la plus basse doit être programmée entre 185 et 200 bpm (indication classe I)
- En prévention secondaire quand le cycle de la tachycardie ventriculaire clinique est connue, il est utile de programmer une zone de TV, 10 à 20 bpm plus lente que la tachycardie (indication classe IIA) La priorité de programmation des premiers défibrillateurs implantables était de permettre une détection et un traitement rapides des arythmies ventriculaires en raison de différents facteurs : la plupart des patients étaient implantés en prévention secondaire d’une mort subite récupérée, le temps de charge d’un choc monophasique pouvait être long (plus de 10 secondes), le seuil de défibrillation pouvait augmenter en parallèle avec la durée de l’arythmie, il existait un risque de sous-détection ventriculaire qui se majorait également avec la durée de l’arythmie. De même, les zones de tachycardie étaient parfois, en fonction des habitudes des différents centres, programmées relativement basses, l’objectif étant de traiter toutes les arythmies ventriculaires cliniques.
- Chez tous les patients présentant une cardiopathie structurelle (à risque de présenter une TV organisée), il est recommandé de programmer au moins une séquence de stimulation anti-
- tachycardique (sauf si elle se révèle inefficace ou arythmogène) dans les zones de TV et de FV pour réduire la nécessité de délivrer un choc électrique (indication classe I). Un burst plutôt qu’une rampe (indication de classe I) comprenant au moins 8 stimuli avec une durée de cycle correspondant à 84-88% du cycle de la tachycardie (indication de classe I) doit être programmé
- Les algorithmes de discrimination doivent être programmés (à l’exception des patients avec une conduction auriculo-ventriculaire altérée) jusqu’à des fréquences élevées (230 bpm) pour réduire le risque de survenue des thérapies inappropriées (indication de classe I)
- Il est conseillé de déprogrammer les horloges (time-out) qui forcent la survenue des thérapies après une durée déterminée même si le dispositif diagnostique une SVT (indication classe IIB) L’association entre la programmation de zones de tachycardie relativement hautes, de compteurs avec un nombre de cycles requis élevé (30) et des algorithmes de discrimination VT/SVT effectifs jusqu’à des fréquences de l’ordre de 200 à 230 bpm a permis de réduire considérablement le taux de thérapies inappropriées. Le besoin de discriminer l’origine des tachycardies est maximal chez les patients à risque de chevauchement entre les fréquences de TV et celles de TSV (patients présentant des TV lentes, patients présentant des épisodes de FA rapide ou de tachycardie sinusale). A l’opposé, les algorithmes de discrimination doivent être déprogrammés chez les patients présentant un bloc auriculo-ventriculaire complet. Sur les dispositifs Abbott, la discrimination n’est possible que dans les limites des zones de TV (impossible dans la zone FV). Programmer la borne basse de la zone de FV a donc une influence capitale sur la possibilité de discriminer les arythmies, ce qui explique pour partie le choix de recommander une zone de FV à partir de 250 bpm. La limite recommandée pour exercer cette discrimination est de 230 bpm à la suite de la constatation chez certains patients d’épisodes de FA au-delà de 200 bpm et pour éviter de discriminer les arythmies trop rapides (> 230 bpm), l’incidence d’une SVT étant très faible au-delà de cette limite avec en plus un risque de mauvaise classification d’une arythmie ventriculaire compromettant le pronostic du patient.
Fonctionnement de l'algorithme SecureSense™
Principes de fonctionnement de l’algorithme SecureSense™
- cet algorithme est basé sur une analyse de la concordance ou de la discordance entre la présence de cycles ventriculaires courts sur le canal bipolaire et sur un second canal, le canal de discrimination. Un compteur de bruit est intégré dans la décision de délivrer ou d’inhiber les thérapies. Une fois activé, il s’incrémente pour chaque cycle court détecté dans le canal bipolaire et est remis à 0 à la suite de la mise en évidence de 2 cycles courts non consécutifs dans le canal de discrimination.
- l’algorithme suspecte la présence d’une surdétection et inhibe les thérapies si il existe une discordance entre les 2 canaux: présence de cycles courts sur le canal bipolaire incrémentant le compteur d’arythmie mais absence de cycles courts sur le canal de discrimination.
- l’algorithme suspecte la présence d’une véritable arythmie ventriculaire et ne bloque pas les thérapies programmées si il existe une concordance entre les 2 canaux: présence de cycles courts sur le canal bipolaire incrémentant le compteur d’arythmie et présence de cycles courts sur le canal de discrimination.
- l’algorithme diagnostique un épisode de bruit non soutenu, si le compteur de bruit s’incrémente sans que le compteur d’arythmie ne soit rempli; cela permet d’identifier les problèmes de surdétection même quand ils sont très intermittents.
- il existe une protection contre le risque d’inhibition des thérapies en présence d’une sous-détection dans le canal de discrimination; cet élément est essentiel pour préserver une sensibilité maximale de l’appareil pour le diagnostic des arythmies ventriculaires.
- cet algorithme fonctionne avec la programmation de notifications pour le patient (vibrations du boîtier) et d’alertes de télémédecine (Merlin.net™), ce qui permet de réduire le délai entre la mise en évidence de la surdétection par l’appareil et la prise en charge médicale.
- Le canal de discrimination
Ce canal est utilisé à la fois pour l’algorithme SecureSense™ mais également pour optimiser la discrimination entre arythmies d’origine ventriculaire ou supra-ventriculaire. La détection dans le canal de discrimination peut s’effectuer entre le coïl ventriculaire droit et le boîtier ou entre l’électrode distale ventriculaire droit et le boîtier (paramètre programmable). Il s’agit donc dans les 2 cas d’une détection de type «unipolaire» (un seul pôle étant situé dans le cœur) ou «far-field», les signaux enregistrés se rapprochant de ceux enregistrés par un électrocardiogramme de surface. En nominal, la détection sur le canal de discrimination s’opère entre le coïl et le boîtier. Il est à noter que si la configuration électrode distale - boîtier peut constituer une option intéressante pour la discrimination de l’origine des arythmies, elle doit probablement être évitée pour une détection effective des ruptures de sonde. En effet, l’électrode distale étant commune aux 2 canaux qui sont comparés, une dysfonction de l’électrode distale peut se traduire par la présence de cycles courts surdétectés à la fois sur le canal de choc et sur le canal de discrimination (remise à 0 du compteur de bruit et absence d’inhibition des thérapies).
- Détection dans le canal de discrimination et contrôle de sensibilité automatique
Le canal de discrimination fonctionne comme le canal bipolaire avec une sensibilité adaptative automatique: le seuil de détection ne correspond pas à une valeur fixe mais s’adapte automatiquement par rapport à l’amplitude de l’onde R précédente, le niveau de sensibilité augmentant ensuite au cours du cycle, jusqu’à atteindre la valeur minimale programmée (sensibilité maximale) afin de rechercher un éventuel signal de faible amplitude. La période réfractaire post-détection ventriculaire est courte pour favoriser la détection de tachycardies très rapides.
La différence principale par rapport au canal bipolaire est qu’aucun des paramètres n’est programmable: la période réfractaire post-détection ventriculaire est de 150 ms, le niveau d’adaptation de 62.5%sans retard d’adaptation, la sensibilité maximale est de 0.3 mV et le filtre d’atténuation des basses fréquences est désactivé.
Après son activation, l’incrémentation du compteur se fait à la suite de la survenue de cycles courts sur le canal bipolaire: le compteur de bruit est incrémenté de 1 pour chaque détection d’un intervalle court instantané sur le canal bipolaire; un cycle court dans le canal bipolaire peut correspondre à un marqueur F, T ou - si le cycle instantané est court et la moyenne des 4 cycles précédents est lente. La remise à zéro du compteur se fait à la suite de la survenue de cycles courts sur le canal de discrimination: le compteur de bruit est remis à zéro après détection de 2 intervalles courts instantanés sur le canal de discrimination. Ces deux intervalles courts n’ont pas besoin d’être consécutifs. La définition d’un cycle court dans le canal de discrimination varie en fonction du nombre de zones programmées. Si une seule zone de FV est programmée, un cycle est court si il est plus court que 400 ms. Si une ou deux zones de TV sont programmées, un cycle est court si il est plus court que l’intervalle de TV le plus long programmé + 30 ms (si par exemple, zone de TV2 programmée entre 350 et 270 ms et zone de TV1 programmée entre 420 et 350 ms, cycle court à partir de 450 ms).
Compteur de bruit et décision de délivrer les thérapies
- si le compteur de bruit est < 10: a) la discrimination TV/TSV s’applique en zone de TV avant d’éventuellement délivrer la première thérapie; b) la première thérapie est délivrée en zone de FV si il s’agit d’un ATP avant ou pendant la charge. Si le défibrillateur charge ses condensateurs, le compteur de bruit est revérifié en fin de charge (si < 10, le choc est délivré, si ≥ 10 le choc est dévié). Une fois que la première thérapie est délivrée, l’algorithme SecureSense™ est suspendu jusqu’à la fin de l’épisode, c’est à dire jusqu’au retour sinusal.
- si le compteur de bruit est ≥ 10 au moment où le compteur de TV ou FV est atteint, le dispositif diagnostique une surdétection et les thérapies sont inhibées. La valeur du compteur SecureSense™ est revérifiée à chaque redétection de TV/FV (tous les 6 cycles). Si le compteur reste ≥ 10, les thérapies sont inhibées.
- le mode
3 options sont disponibles (Marche, Passif et Arrêt).
Sur marche: épisode de bruit soutenu: inhibition des thérapies, notification au patient (vibration) et alerte de télémédecine; épisode de bruit non soutenu: notification au patient (vibration) et alerte de télémédecine; les différents EGMs sont enregistrés dans les mémoires.
Sur Passif : épisode de bruit soutenu: absence d’inhibition des thérapies, notification au patient (vibration); épisode de bruit non soutenu: notification au patient (vibration); les différents EGMs sont enregistrés dans les mémoires.
Sur Arrêt : les thérapies ne sont pas inhibées, les épisodes de bruit soutenus ou non soutenus ne sont pas enregistrés.
- canal de discrimination
2 options sont disponibles: Coïl VD – Boîtier par défaut ou Distal VD – Boitier.
- minuterie : il est possible de programmer une minuterie pour limiter la durée maximum d’inhibition des thérapies. Si le dispositif diagnostique un bruit soutenu et inhibe les thérapies dans un premier temps, les thérapies seront délivrées en fin de minuterie si le bruit persiste.
- nombre d’épisodes non soutenus nécessaires pour déclencher une alerte : Un seul épisode soutenu avec inhibition des thérapies suffit pour qu’une notification-patient et une alerte de télémédecine soient générées. En revanche, le nombre d’épisodes non soutenus est programmable.